Les grandes stalles représentent 22 apôtres et prophètes. A noter que pour certains personnages, plusieurs hypothèses restent possibles... Les quelques mutilations sont dues à l'arrivée de la Réforme dès 1536. En effet, les réformés étaient scandalisés par le culte des saints qu'ils considéraient comme de l'idôlatrie. Si les vitraux -considérés comme oeuvres d'art et non comme objets de vénération- étaient généralement épargnés, il n'en a pas toujours été de même pour d'autres objets dans les églises. Les personnages sont regroupés par paires, un apôtre faisant face à un prophète. Ces grandes stalles sont présentes à St-Etienne depuis un demi-millénaire ; soyez respectueux !
Les grandes stalles de gauche (en regardant le choeur) sont l'oeuvre de Rodolphe Pottu, elles se terminent par le Christ de pitié.
1. Jérémie
Jérémie est le premier des prophètes à énoncer une proposition, lui qui avait assis sa légitimité face au faux prophètes comme Hananya dont il prédit la mort dans l’année pour ces prédictions mensongères. Jérémie est connu pour la solitude d’une vie sans femme, ni enfant, ce qui le fit souffrir. Il connut aussi l’exile en Egypte pour échapper à la persécution royale dont il dénonçait l’impiété. Néanmoins, il vécut l’épisode heureux pour le royaume de Juda, où lors de travaux au Temple de Salomon, une copie de la Loi fut retrouvée. Le roi Josias fut mis devant la réalité de l’impiété de son peuple et de l’éloignement vis-à-vis du Vrai Culte, dont il reconnaissait l’état de fait y compris pour lui-même. Après avoir pleuré amèrement et avoir consulté la prophétesse Houlda, ou lui annonce que l’exécution de la vengeance divine sur Juda aura bel et bien lieu. Mais comme il fait preuve de repentir sincpre, il ne verra pas la désolation. C’est à ce moment que Jérémie soutient la réforme du Roi, et prophétise l’arrivée des Chaldéens et la destruction de Jérusalem, l’exil du peuple à Babylone.
Son phylactère dit « Pa(t)r(e)m vocabis me et post me (ingredi) n(on) c(essabis) ». Tu m'appelleras "Mon Père" et tu ne te détourneras pas de moi (Jér. III, 19). Dans sa tunique courte le sculpteur l'a représenté vieillissant, avec une longue barbe. |
2. Pierre
C’est l’apôtre qui préside le premier -selon la tradition- aux destinées de l’Église romaine, qui entame logiquement le Credo « Credo in Patrem omnipotentem ». Je crois en Dieu, le Père tout puissant. Il est chargé de la tiare, l’aube, la dalmatique, l’étoile, la chasuble et le pallium et tient en main les clefs. Pour un moudonnois cette vision devait évoquer l’invitation au Salut.
Pierre avait été parmi les plus influents des apôtres. La tradition et les écritures le font participer à nombre d'évènements de la vie du Christ et des débuts de la communauté paléochrétienne. Lorsque le Seigneur voulu enseigner l’humilité en lavant les pieds de ses disciples après une longue marche, peu avant la dernière Pâque et qu’aucun de ses disciples qui l’accompagnait depuis plus de trois ans ne l’avait fait spontanément, il s’était senti humilié. Après avoir protesté et s’être vu rétorqué la parole du Maître « Si je ne te lave pas, tu ne peux pas avoir part avec moi. » (Jean 13:8), il répondit et tenta d’obtenir plus par ces mots « Alors, Seigneur, non pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ! » au verset suivant. Ce tempérament était parlant pour les fidèles au tournant du XVIème siècle. |
3. David
Le roi David, dont le trône était promis au Messie, est affublé par l’artisan de sa lyre qui transparaît de sa besace. Il est reconnaissable par la pourpre royale, d’un manteau garni de fourrure et d’une diadème ornant sa tête. L’autorité est clairement signifiée par le sceptre. Ses nombreuses louanges psalmodiées le font reconnaître au rang de prophète.
Ayant vécu au Xème siècle avant notre ètre, il naquit sous le règne de Saül. S’étant écarté définitivement de l’Eternel, celui-ci avait choisi le plus jeune de la maison pastorale de Jessé: David. Bien que très jeune donc, ce dernier avait mûrit sa foi et, par ses actions, démontré sa justesse de coeur. Il avait vaincu le géant Goliath à l’aide d’une simple fronde et avait servi son roi en jouant de la harpe pour l’apaiser. Il fut ensuite chassé par ce souverain devenu infidèle, mais béni de Dieu dans ses actions et par l’onction d’huile sainte du prophète Samuel. Il a su rassembler les Israélites et monter sur Jérusalem pour en faire sa capitale. Ici, il déclare « Dominus dixit ad me : filius es tu » L'Eternel m'a dit : Tu es mon fils. (Ps. II) |
4. André
Parmi les tout premiers disciples, (Saint-)André, que l’on reconnaît par son instrument de martyre -la croix en X- a rencontré Jésus peu après le baptème du Christ. C’est pourquoi il est connu comme « protoclet », le premier, appelé en grec. Frère de Pierre, c’est lui qui provoquera leur rencontre. Il est, selon la tradition, l’évêque de Constantinople. Avec son frère à la tête prétendument de la Grande Métropole il symbolise l’Union des Eglises.
Sa banderole porte le second article de la foi « Et in Jhesum xrs, filium eius (unicum nostrum) ». Et en Jésus-Christ, son Fils unique. |
5. Esaïe
En parlant du Christ, il est temps d’annoncer son existence et c’est à Esaïe que cette responsabilité est confiée. Ce prophète dénonce le relâchement du royaume de Juda, après un bref sursaut sous le règne de Josias. Le culte de l’Eternel est souillé par l’idôlatrie. C’est particulièrement le cas avec le roi Manassé qui va persécuter le prophète. Esaïe annonce la montée de l’Assyrie sur la Palestine et la destruction de Jérusalem ainsi que de son Temple. Puis plus tard, le retour du peuple et de la reconstruction du Saint bâtiment. Il annoncera aussi prophétiquement la venue de l’Emmanuel (le Messie).
Il est coiffé d’un chapeau en bataille, capé et botté. Sur son phylactère est écrit « Ecce virgo concipiet et pariet filium eius ». Voici, la Vierge sera enceinte ; elle enfantera un fils (Es. 8:14). |
6. Jacques le Majeur
L’apôtre à la coquille du pèlerin, muni des restes du bourdon -la canne du pèlerin-, la pèlerine, la cape et les hautes chausses, est le fils de Zébédée. Avec son frère Jean, ils se montrèrent -durant leur compagnonnage avec le Christ- très impulsifs. Ils furent surnommés les « fils du tonnerre » à l’occasion d’un incident impliquant le refus des habitants de Samarie d’accueillir pour la nuit la Sainte troupe. A ce moment, Jacques et Jean suggèrent au Seigneur de faire tomber la foudre, et donc faire retentir le tonnerre sur ces impies. La Samarie était pour les Juifs une nation d’immigrés, qui avait remplacé le peuple du royaume d’Israël du Nord et avait adopté un culte bâtard entre paganisme et hébraïque. Les apôtres n’avaient semble-t-il pas encore saisi que le message divin s’adressera bientôt aussi à ces populations éloignées de la Parole.
Par contre le Christ pris soin de le prendre à témoin lors de la Transfiguration, de la résurrection de la fille du chef de la synagogue, ou encore lors de la troisième apparition de Jésus après sa mort, sur les bords du lac de Tibériade. Episode où il invite ses apôtres à littéralement pêcher de l’autre côté de leur barque, et ainsi miraculeusement remplir leur filets. |
Ce néanmoins fidèle apôtre est, selon la tradition, connu pour un pèlerinage. Selon la légende le corps de l’apôtre avait connu le martyr à Jérusalem, sur ordre d’Hérode, comme le déclare les Actes 12:2. Il fut rapatrié par deux disciples en Galicie, sur bateau sans voile, ni rame. Ainsi n’est-il pas étonnant qu’il lui soit fait dire «Et in Jhesum xrs, filium eius (unicum nostrum) ». Et en Jésus-Christ, son Fils unique qui a été conçu du St-Esprit.
7. Nahum
PETIT PROPHETE.
C’est encore à l’époque du roi Manassé que l’on trouve le prophète suivant: Nahum, le septième des douze petits prophètes, celui dont on ne connaît l’existence que par son livre éponyme. Livre qui annonce le danger que représente l’Assyrie, son déferlement sur le royaume de Juda, la destruction de Ninive -telle quelle même l’avait fait subir à la ville de Thèbes- et la fin misérable de cet empire assyrien, voué à l’idolâtrie, et dont Dieu se servit pour châtier le peuple juif qui s'était tant éloigné des préceptes divins.
C’est pourquoi on lui fit dire « Omnes qui audiverunt auditionem tuam » (Nahum III : 19). Tous ceux qui entendront parler de ton sort. |
8. Jean
Jean, le frère de Jacques était l’apôtre bien aimé de Jésus. Il poursuit le Credo en ces termes « Passus sub Poncio Pilato, cruci(fixus) », Il a souffert sous Ponce-Pilate.
Selon la tradition il est le seul à ne pas avoir connu de mort violente. Toutefois, la légende veut qu’à Ephèse, après avoir évangélisé, le prêtre de Diane, Aristodème, l’éprouva. Il proposa à l’apôtre de boire volontairement une coupe pleine du venin d’un serpent, que l’on retrouve dans notre représentation. Sorti indemne de cette épreuve, le saint rallia à lui nombre de nouveaux disciples. |
9. Osée
PETIT PROPHETE.
Le premier des "petits prophètes", Osée, a du prendre une femme adultère qui lui donna trois fils. Il devait vivre cette situation, à l'image de Dieu qui le faisait avec son peuple devenu impie. Osée devait bien porter son fardeau, sa croix, ce qui justifierait peut être cette anachronique accessoire. Ou alors faut il voir dans l’énoncé de son phylactère l’explication de cette représentation du mortel instrument de torture qui cite Osée 13:14 « O mors, ero mors tua. » Je serai ta mort, ô mort.
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10. Philippe
Sous les traits d’un moine légèrement enrobé, portant un sachet, c’est Philippe, l’apôtre des Scythes. Selon la tradition il fut lapidé et crucifié. L’apôtre fut maintes fois -comme le relate les évangiles- celui qui fit le lien avec les foules qui venaient au Seigneur. C’est lui qui accueillit les grecs demandant le Christ. C’est l’oeuvre de mission qui est reproduite ici, puisque la tradition lui attribue plus de 20 ans de prêches dans les régions d’Asie Mineure et sur les terres des Scythes.
Il lui est traditionnellement prêté dans le Credo « De scen dit ad inferna ». Il est descendu aux enfers. Philippe termine la première série de stalles. |
11. Jésus-Christ
Le personnage représentant Jésus-Christ a eu semble-t-il le visage mutilé par les Réformés, car assimilé à de l'idôlatrie. C’est une image d’un Christ sacrifié, tendant les mains, montrant ses plaies, qui s’explique par la dévotion qui se généralise depuis le XIVème siècle. Sa place primitive dans les stalles servait-elle à masquer des piliers ou appartenait il à des sièges disparus ? La question reste ouverte.
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